Mars 2024
Parmi les premières fleurs du printemps, la Pulmonaire comme toutes ses cousines de la famille (bourrache, vipérine…) hésite beaucoup sur le choix de sa robe : rose, pourpre, violet bleu, bleu-violet, bleu ?
La couleur des fleurs bleues…
La couleur des fleurs des pulmonaires est due à des pigments contenus à l’intérieur des cellules des pétales, appelés « anthocyanes ».
Les anthocyanes ont la particularité d’être sensibles à l’acidité du milieu : le degré d’acidité perturbe leur structure ce qui modifie la couleur. Ils sont bleus en milieu neutre mais virent au rose/rouge si le milieu devient acide.
Le chou « rouge » contient des anthocyanes.
A droite abandonné à l’air libre, à gauche assaisonné au vinaigre….
La couleur des fleurs de Pulmonaire dépend donc de l’acidité des cellules qui contiennent les anthocyanes.
La robe passe du rose au bleu…
Les toutes jeunes fleurs de pulmonaire, fraîchement écloses sont roses puis, en quelques jours, elles virent au bleu.
Ce changement est dû à une modification du milieu intra-cellulaire : d’abord acide dans le bouton floral, puis neutre, il devient légèrement basique dans la fleur à maturité. Détail pour les férus de chimie : le pH diminue d’un point, soit 10x moins d’ions H+…
Les bourdons préfèrent les robes roses…
Les fleurs de pulmonaire sont butinées par les bourdons et certaines abeilles … Observez : ce sont surtout les fleurs roses qui sont butinées ! Pourquoi ?
Lorsque la fleur s’épanouit et change de couleur on constate une baisse de la production de nectar, liquide sucré qui se trouve au fond de la fleur et qui est recherché par la trompe de l’insecte. Donc plus la fleur est bleue moins il y a de nectar.
Et les pollinisateurs apprennent très vite que la couleur rose est associée à une meilleure table !
N’empêche que les fleurs s’ouvrent de manière progressive et, dans un bouquet de pulmonaires, il y a toujours beaucoup de fleurs bleues, ce qui attire de loin bourdons et abeilles particulièrement sensibles à la couleur bleue.
Donc pour résumer : ==> du bleu pour attirer les insectes de loin, ==> du rose pour signaler « c’est ici que ça se passe ! ».
En revanche les abeilles ne voient pas le rouge pur… alors pourquoi les coquelicots sont-ils butinés ? Peut-être l’objet d’un prochain article ?
Pour en savoir plus : https://www.zoom-nature.fr/quand-le-bleu-devient-un-feu-rouge/
« Il reviendrait souvent dans ce carré heureux,regardant trotter un hérisson,vibrer un papillon sur une fleur,butiner un bourdon,danser des ballets de moucherons. L’opiniâtreté des fourmis, la fuite d un ver de terre, le glissement d’un escargot jaune,tout cela lui donnait une idée d’autres mondes, de galaxies en réduction »….
Robert Sabatier, Les Noisettes Sauvages.
merci Michèle pour cet article bien intéressant …
Sais tu si la pulmonaire bleu est comestible ?
bonne idée sur le thème des coquelicots et des abeilles !
Bonjour Johanne,
Oui, l’ensemble de la plante, comme la bourrache ou la consoude, qui sont de la même famille, est comestible (références François Couplan ou Gérard Ducerf) mais avec modération comme toutes les plantes sauvages qui sont plus riches en tanins. De plus les plantes de cette famille contiennent des alcaloïdes qui peuvent être toxiques à haute dose ou en cas de consommation trop régulière.
Le nom de « pulmonaire » est à relier à l’aspect de la feuille : les taches évoqueraient les alvéoles pulmonaires et aux propriétés médicinales de la plante, utilisée dans les affections des voies respiratoires.
Toujours très intéressant, comme toujours Michèle !
Merci de nous faire redécouvrir ces petites choses qui nous paraissent si banales de nos jours mais sont aussi fantastiques les unes que les autres, pour peu qu’on prenne le temps de s’y pencher !